Je voudrais vous parler ici d’un célèbre pépiniériste et le père de la pomologie belge sans qui nous n’aurions pas autant de poires aujourd’hui dans le monde : Jean-Baptiste Van Mons (1765-1842) !

Ses poires les plus connues
Parmi les nombreuses poires créées, découvertes ou diffusées par Jean-Baptiste Van Mons, il y a notamment la poire Leon Leclerc qui est citée comme une des meilleures poires qu’il ait créée. Vous connaissez peut-être aussi la Beurré de Mérode (ou Double-Philippe), la Bon chrétien D’Espagne ou La nec plus Meuris obtenue par son jardinier en 1822. (Pour ceux qui souhaiteraient goûter la poire beurré de Mérode, j’ai découvert un arbre à Jodoigne que je multiplie par greffe et je vends les scions dans la pépinière du Potager du Gailleroux. Plus d’infos ici : https://www.lepotagerdugailleroux.com/arbres-fruitiers/)


Sa pépinière située à Bruxelles comptait plus de 80000 arbres fruitiers ! Il est considéré comme un précurseur de plus de 500 variétés de poires. Il a travaillé pendant 45 ans à créer de nouvelles variétés !
C’était un homme remarquable pharmacien, médecin, professeur de pharmacie, chimie, de physique et d’agronomie. Il a rencontré ou communiqué avec les plus grands esprits de son époque : Charles Darwin, Antoine Laurent Lavoisier, Benjamin Franklin, Alessandro Volta le créateur de la pile et encore beaucoup d’autres.
Comment il obtient ses succès
Jean-Baptiste Van Mons a travaillé pour obtenir plein de nouvelles variétés de fruitiers. « Le principe était simple » : renouveler sans cesse les variétés anciennes reconnues pour exquises par les semis et noyaux ! Il a identifié que plusieurs successions de semis et de sélections permet d’améliorer de manière significative la qualité gustative des fruitiers :
– Le pêcher et l’abricotier : dès trois renouvellements
– Le pommier : dès son quatrième semis
– Le poirier : il faut davantage de générations. De la troisième à la sixième génération l’obtention de cultivars intéressants augmente significativement
Elément étonnant aussi c’est que Jean-Baptiste Van Mons préfère la graine d’une variété médiocre souvent renouvelée plus qu’une variété délicieuse peu renouvelée. Il a constaté que le pourcentage de bonnes poires issues de ces semis s’améliore nettement par un renouvellement répété.
Le coup du sort
Le sort s’est acharné sur le travail de Jean-Baptiste : la Ville de Bruxelles lui demande de quitter le terrain qu’il louait. Il a sélectionné sous la pression du temps alors les sujets les plus précieux et il a envoyé des centaines de variétés à ses collègues. Il a transféré une partie de sa collection à Louvain là où il enseignait. Malheureusement en 1831, l’armée française s’installe sur son terrain afin d’y construire des fours à pains pour ses soldats. Les arbres sont coupés comme bois de chauffage. Il était question de repousser les Pays-bas qui voulaient reconquérir les 8 provinces perdues un an plus tôt lors de l’Indépendance belge. Il déplace à nouveau ses collections sur deux terrains qu’il loue. Mais trois ans plus, tard ses terres sont réquisitionnées pour y installer une usine à gaz. On ose imaginer le nombre de variétés disponibles aujourd’hui si ces évènements ne s’étaient pas déroulés.

Suite à l’Indépendance de la Belgique en 1830, Guillaume 1er l’envahit en 1831 pour récupérer les Huit provinces perdues. Léopold 1er, à peine intronisé, appelle la France et l’Angleterre qui se sont portées garantes pour défendre l’Indépendance de la Belgique. La France envoie l’armée du Nord et utilise, ici pour la première fois à la citadelle d’Anvers, le mortier afin de dérouter les Néerlandais qui capitulent le 23 décembre 1832. Cette armée du nord française est passée malheureusement à Louvain et oblige Jean-Baptiste Van Mons à déplacer sa collection de fruitiers pour la deuxième fois.
Les successeurs
Selon les successeurs de Jean-Baptiste Van Mons, on aurait pu s’attendre à une explosion de l’apparition de nouvelles variétés. Malheureusement il n’en est rien. La société Van Mons a poursuivi le travail de 1854 à 1869 avant de sombrer faute de soutiens suffisants. La 11 et 12ème génération à Saint-Rémy-Geest (Jodoigne) n’a pas fourni de poires remarquables. « Il semblerait au final, que la troisième génération de fruits anciens est souvent suffisante pour obtenir les meilleurs résultats » (Charles Gilbert). On peut citer, dans les successeurs de son travail, le remarquable M. Grégoire-Nélis qui créa 85 variétés de poires de 1847 à 1871 à Jodoigne.
Jean-Baptiste Van Mons, le père des poires, aura marqué le monde de son travail incroyable. Il nous inspire et nous invite nous aussi à semer des arbres fruitiers. C’est un acte militant d’adaptation du vivant face au changement climatique et également face à l’uniformisation des variétés de fruitiers. Nous avons besoin de davantage de multiplicateurs de graines parmi les pépiniéristes, et tout comme Jean-Baptiste Van Mons !
Sources bibliographiques
- Gilbert CH., 1873. Les fruits belges. Abrégé historique de la Pomolgie belge, Imprimerie Félix Callewaert père, Bruxelles, 82 p.
- Van Mons J.-B., 2018. Arbres fruitiers, leur culture en Belgique et leur propagation par la Graine, ou pomonomie belge, expérimentale et raisonnée, Vol. 1. Forgotten Books, Bruxelles, 512 p.